Pour que jamais ne l'emporte la résignation
En 2001, lorsque le Festival de Liège a pris la suite des Rencontres d’octobre, nous faisions le pari qu’il s’affirme comme un Festival engagé, vivant en phase avec son époque. Pendant trois semaines, la Cité ardente se transforme en un véritable carrefour culturel, un lieu de rencontres intenses, de découvertes artistiques venues des quatre coins du monde.
Ici, se croisent des démarches authentiques, des créations audacieuses et des moments de fête inoubliables.
A l’heure où nos valeurs démocratiques vacillent, où la fracture sociale s’accentue, où l’impensable d’hier fait désormais partie d’aujourd’hui, en ces temps de folies guerrières, ces temps où les loups sortent des bois avec fierté et arrogance, il nous paraît plus que jamais crucial de dépasser nos propres frontières, d’aller à la rencontre de l’autre, de croiser nos regards, nos cultures et nos langages et de rester fidèles à ces objectifs artistiques et politiques qui ont forgé notre identité depuis 25 ans.
Du 31 janvier au 22 février, nous accueillerons des artistes qui tou·te·s seront animé·e·s de la même ambition : susciter l’émotion, le questionnement et la réflexion. Iels viendront d’Iran, du Liban, de Pologne, d’Ukraine, du Rwanda, de Bolivie, de Suisse, de Biélorussie, du Chili, de Serbie, d’Allemagne, d’Italie, de France, des Pays-Bas et de Belgique. Parmi eux·elles, des noms familiers et d’autres à découvrir : Emma Dante, dont la fidélité au Festival n’est plus à prouver, ou encore la compagnie chilienne La Re-sentida qui nous invitera à interroger nos démocraties, à repenser nos modèles. La Cie Dyptik ouvrira le bal avec un spectacle envoûtant qui promet de nous faire vibrer dès les premières minutes, tandis que Dorcy Rugamba nous proposera un témoignage bouleversant sur le génocide rwandais.
A leurs côtés, nous découvrirons des artistes aux univers singuliers : Nastaran Razawi Khorasani nous dévoilera des fragments poignants de la vie en Iran. Igor Shugaleev nous transportera dans la lutte pour la liberté en Biélorussie. La compagnie suisse Klara Theaterproduktionen nous plongera dans l’une des prisons les plus dures du monde. Les Serbes du groupe rock Vrooom nous partageront leur utopie en musique et en dérision. L’italienne Licia Lanera s’emparera de deux textes d’Antonio Tarantino et nous proposera une œuvre poignante sur la diversité et l’altérité. Les masques impressionnants du collectif berlinois Familie Flöz nous offriront mille et une émotions. La compagnie de danse Maciej Kuźmiński quant à elle explorera les effets du traumatisme, de l’exil en temps de guerre. Nous clôturerons le Festival avec le chorégraphe libanais Omar Rajeh, qui fera exploser les bouchons de la bonne humeur.
Aussi, la part belle sera faite aux artistes de la Fédération Wallonie-Bruxelles avec 4 créations : So?!What, de la chorégraphe et danseuse Ariadna Gironès Mata, questionnera l’identité et les attentes sociales, La Taranta‒Heureux sans héros, spectacle musical de Martine De Michele/En Cie du Sud, nous emmènera dans une exploration faites de récits, de chants, de témoignages et réunira un Chœur Populaire de 160 citoyen·ne·s, Shut up and Smile, la première création de Marina Yerlès/Réflexive Cie, nous proposera une plongée passion-nante dans le monde des ados et That moment de Sopa Boba nous donnera à entendre un oratorio mêlant synthés modulaires, quatuor à cordes et spoken word.
Enfin, parce qu’elle aussi est l’âme de notre festival, nous ferons la fête. Et ardemment… Pour cette édition, nous nous sommes entouré·e·s du label Homerecords pour les concerts mais aussi d’artistes (DJ’s, collectifs, musicien·ne·s, performeur·euse·s...) qui chacun·e à sa façon proposera un moment qui toujours sera empreint de bienveillance et d’inclusivité. Ainsi tous les jeudis, vendredis, samedis, nous vous inviterons à écouter, à chanter, à vous déhancher, à vous déguiser… La fête comme une irrésistible envie de se sentir vivant·e·s.
Mais le Festival de Liège, ce ne sont pas que ces trois semaines. C’est un acteur permanent, vivant et dynamique de la vie culturelle de la Cité. Tout au long de l’année, il ouvre les portes du Manège Fonck à divers événements et festivals, ainsi qu’à des compagnies en résidence, qu’il accompagne dans leur parcours. Cependant, nous ne recevons toujours aucune aide financière pour ces activités, ce qui menace leur existence, ainsi que celle d’une série de petits opérateurs qui trouvent au Manège Fonck un espace accessible pour partager leur travail.
Mais loin de nous arrêter à ces difficultés, nous choisissons la résistance, l’optimisme et la joie !
Ce festival est le vôtre. Celui de tou·te·s ceux·celles qui croient en la puissance de la culture comme réponse à un monde en proie aux incertitudes, en son pouvoir de transformer, de faire réfléchir, de créer des liens et de réveiller les consciences, pour que jamais ne l’emporte la résignation.
Que ce soit à travers les spectacles, les rencontres avec les artistes proposées par Médiathèque Nouvelle, ou les moments festifs, nous espérons que cette édition vous apportera autant de plaisir que nous en avons eu à la préparer.
L’équipe du Festival de Liège